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Vrai ou faux ?
Supposez que vous reveniez d’un périple qui aurait duré un peu moins de 10 ans, supposez que ce périple vous aurait coupé du « monde » et de son brouhaha. Quelle ne serait pas votre surprise en vous connectant au moment de votre retour à la civilisation moderne.
Vous découvririez les réseaux sociaux au rang desquels Twitter. Et là, une certaine perplexité vous envahirait. Dans ce monde numérique parallèle, lieu d’une expression collaborative, près de 300 millions d’internautes s’attèlent chaque jour à réécrire l’Histoire et ainsi à transformer notre présent. Les « fake news » comme on le dit maintenant occupent une place de choix. Apparaissant parfois pour ce qu’elles sont ou se dissimulant avec subtilité dans telle ou telle présentation de situations. Bien difficile de faire la part des choses entre le vrai et le faux d’autant l’un et l’autre recourent à l’exact et à l’inexact. Autrement dit, les frontières entre vrai et faux se déplacent en cela que le faux peut abriter du « vrai » (de l’exact) et inversement. Arrivant de votre périple, vous constatez de façon aigüe que les réalités dans lesquelles nous vivons sont des réalités sociales, des réalités construites qui sans cessent viennent interroger le statut du vrai et du faux. Mais dans ce monde numérique, l’interrogation et le doute critique laissent bien souvent la place aux affirmations, aux certitudes et aux « fake » œuvrant en émissaires d’idéologies quant à elles, rarement nouvelles. Ici, l’homme n’a jamais marché sur la lune, le 11 septembre a été instigué par la Maison Blanche, Barack Obama est un islamiste né au Kenya, Christiane Taubira a un fils emprisonné pour meurtre, un étudiant a été mis dans le coma par des policiers qui cherchaient à l’évacuer d’une faculté parisienne occupée, l’arabe va être enseigné dans les écoles françaises, Darwin est un imposteur face aux créationnistes, les réfugiés qui fuient la guerre ou les migrants la misère viennent pour remplacer les français « de souche »…. Si les mensonges et autres légendes urbaines sont aussi vieux que le langage lui-même, la force de frappe instantanée et illimitée des réseaux sociaux leur confère aujourd’hui une influence sans égal et, plus problématique encore, sans contre-pouvoirs. Face aux manipulateurs de canulars, aux militants aux obsessions affirmées, aux politiques sans surmoi, aux complotistes pathologiques ; notre toujours possible naïveté et la passivité des autorités participent à affaiblir ce qui fait le fondement de notre démocratie et la possibilité de vivre ensemble : la confiance dans la parole.
octobre 2018