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Engageons-nous…

L’engagement a été pour Stéphane Hessel le combat d’une vie. Dans « engagez-vous », livre interview, il a su nous donner une idée de ce que l’engagement veut dire. Et cette question majeure de l’engagement se retrouve un peu partout, en particulier dans l’entreprise, en tant que préoccupation des dirigeants si l’on en croit les multiples études qui fleurissent sur le sujet.

Cette question qui n’est pas nouvelle a déjà suscité de nombreux travaux. « L’école des relations humaines » d’Elton Mayo dans le contexte de crise des années 30 cherchait des réponses à cette question dans une perspective utilitariste et productiviste. Les transformations de la société sont mises en actes dans les transformations des rapports sociaux. L’altération du lien, du lien social au travers des revendications individualistes et « autonomistes » des acteurs entraine la mise en difficulté d’un principe essentiel : la réciprocité. Si lien social et individualisme sont un enjeu sociétal, ils le sont de facto pour l’entreprise : restaurer « du » collectif, s’attacher à développer les projets communs, à partager des finalités collectives. Par ses travaux, le sociologue Norbert Alter montre, en s’appuyant sur la théorie du don de Marcel Mauss considéré comme père de l’anthropologie française, que la coopération si essentielle pour l’entreprise repose sur la volonté de donner des salariés bien plus que sur la rationalisation qu’incarne la mise en procédure et son cortège de contraintes ; bien plus également que sur une conception fondée sur « l’intérêt individuel », entendons économique. Donner permet d’échanger et par là d’exister en entreprise, de créer des liens sociaux et, d’obliger autrui. Car le don engage celui qui le reçoit… Valoriser le lien social c’est développer le plaisir de « l’être ensemble » et du « faire ensemble », c’est donner sens à un « être collectif ». Cet « être collectif » est au cœur du capital social de l’entreprise. Il apparait alors que le management aurait tout intérêt à permettre aux collaborateurs d’entretenir et cultiver ce capital social à partir duquel ils peuvent d’autant mieux investir les objectifs et les règles de l’entreprise. Ainsi donc il n’y a d’engagement que dans la relation ; il se fonde sur le lien construit entre les acteurs sur les dynamiques de réciprocité qu’oriente le don. L’engagement dans la durée suppose alors de travailler les écarts croissants entre les formes de l’engagement et leur reconnaissance sociale. La valorisation du lien social d’une part et, la valorisation du travail réel d’autre part sont deux axes essentiels pour un management qui créait les conditions de l’engagement tant individuel que collectif. C’est sur ces dimensions que se construit un fonctionnement orienté par la coopération. Alors en écho et en hommage, engageons-nous…

Éditorial de Philippe Bigot
avril 2013