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Voir et être vu...

La vidéo est en passe de devenir le meilleur ami de l’homme… Celle-ci devient omniprésente dans nos espaces de vie, à la fois sociaux et intimes. Subrepticement l’objet s’installe, il est au centre de nombre d’émissions TV dites de « réalité », il est sacré meilleure réponse à l’insécurité (thème inépuisable depuis des siècles…), il est censé être objectif en montrant la « réalité » donc…

Avec la TV réalité, on voit « se donner à voir » – grâce à la caméra – des personnes embarquées dans des situations qui devraient nous divertir, sauf que pour le divertissement, c’est le pathétique et la niaiserie qui l’emportent. Et tout cela est possible avec une simple caméra qu’on devrait même finir par oublier… mais la caméra, elle, ne nous oublie pas ! D’ailleurs, le débat reste ouvert, qui est responsable, le voyeur ? L’exhibitionniste ?...La vidéo ce n’est pas que du divertissement. Nos villes se soumettent à l’œil alerte des vidéos - avec les meilleures intentions puisqu’il s’agit de notre sécurité. Nous savons bien ce dont pavent les bonnes intentions… Plus créatifs sont les anglais dans l’expérimentation des moyens vidéo. Associer une caméra et un haut parleur fallait y penser ! Ainsi on peut immédiatement interagir avec une injonction, devant tout le monde, ceux et celles qui ne se comportent pas bien. Telle personne jette son mégo, ticket de métro au sol, elle est vue est rappelée à l’ordre par le haut parleur ! Effet de surprise garanti d’autant que tout le monde autour de vous est également informé, et vous regarde. Difficile d’échapper à l’humiliation dans pareil cas. De la TV réalité en somme… Faut-il que nos surmois individuels soient devenus si défaillants ? La logique du contrôle et de la surveillance n’est jamais bien loin et l’histoire ne dit pas qui surveille ceux qui surveillent…. Avec la vidéo dans l’exemple anglais, un œil juge et critique est là pour rappeler ce qu’est la norme, le bien et le mal, rappeler à l’ordre par l’injonction. Certainement s’agit-il moins de défaillance de notre bon vieux surmoi que de lui substituer un « moi idéal » et social dont la férocité peut devenir rapidement redoutable et auquel nous n’aurions plus qu’à obéir. A la moindre dérive, quelqu’un sera là pour nous ramener dans les rails, rassurant de pouvoir ainsi compter sur son prochain… Le XXIe siècle ne sera peut être pas spirituel mais policé comme le désirait tant Fouchet ! Le bonheur en ligne de mire donc…

Éditorial de Philippe Bigot
mai 2009