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Le coach et ses symptômes…

Qui n’a pas ses symptômes ! Alors que la pratique du coaching dans le champ professionnel se développe depuis le milieu des années 80, nous avons maintenant le recul pour une petite étude épidémiologique… Parmi les symptômes les plus symptomatiques qu’un coach peut donner à voir, il en est un assez fascinant : l’écholalie...

L’écholalie est le signe d’un coach mimétique c'est-à-dire homothétique qui a absorbé les codes, le langage et parfois même les us et coutumes de ses clients… Imaginons donc quelques instants, un coach qui parlerait comme ses clients… lequel coach n’est pas sans savoir – a priori - que parler comme ses clients revient à penser comme eux… et que, penser comme eux se traduit nécessairement par « agir » comme eux. Bref, l’indifférenciation est alors de mise entre le coach et son client. Ces symptômes deviennent préoccupants lorsque l’écholalie tient lieu de discours. Mais concrètement me direz-vous ? Et bien voilà, nous pouvons voir, lire et entendre ici ou là, depuis quelques années, des coachs embarqués dans un discours managérial lorsqu’il n’est pas, en plus, mâtiné du langage de l’économie. Et ce genre de discours a des traductions très concrètes chez le coach : il parle de « gestion » véritable leitmotiv (le coach et le coaching pour gérer : son temps, ses émotions, ses relations…), il manifeste une préoccupation particulière pour le « R.O.I » (Return On Investment) au point qu’on trouve des textes sur le sujet, enfin il manifeste son goût affirmé pour la « création de valeur »… Et tout cela, plus ou moins explicitement, pour tenter de répondre à la question : un coaching ça rapporte quoi ? Combien à l’entreprise ? Y en a même qui ont été jusqu’à chiffrer les gains de productivité obtenus grâce à un coaching ! Evidement à transporter du langage, des concepts d’un champ à un autre n’est pas sans effet. Développer un discours de coach et un discours sur le coaching sous tendus par le langage économique et managérial revient à installer le métier à une certaine place notamment idéologique qui ne peut qu’en neutraliser les finalités. Et si en plus, le discours économico-managérial du coach se déplie dans les organisations professionnelles… nous ne pourrons alors qu’assister à un numéro de ventriloque. Les coachs vont ainsi retrouver ni plus ni moins que les mécanismes et logiques pour lesquels leurs clients viennent les consulter ! Autant dire que le coach soucieux de travailler sa pratique, de rencontrer ses pairs va rencontrer quelques obstacles majeurs tant le sentiment du déjà vu et du déjà entendu va obstruer toute perspective sur le métier pour ne pas dire toute réflexion. Comment ne pas être sensible à la présence, à l’intrusion de ce discours lorsqu’on fait un métier fondé sur le langage ? Et puis, disons le, si le coach pense et parle comme son client, alors, quelle fonction peut-il avoir ? Et quel devenir pour les organisations professionnelles ? Nombre de questions sont donc posées par ces glissements sémantiques chez le coach, glissements qui sont autant de symptômes… Seul le débat est porteur de l’émergence d’un autre discours. Et si à la « création de valeur », empruntée à l’économie nous nous mettions à préférer la valeur de la création…

L’équipe de Convergence vous souhaite un bel été…

Éditorial de Philippe Bigot
juillet 2011