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Raconter la vie

Il est des projets où l’humain en fonde le fond.
Il est des projets qui savent s’affranchir des normes en vigueur.
Il est des projets où la parole, la vie mise en récit trouvent une place, leur place.

A l’initiative de Pierre Rosanvallon, professeur au Collège de France, Raconter la vie fait œuvre de salut public dans une société de mise en scène permanente où l’apparence fait figure de consistance…

Raconter la vie interpelle sur différents plans. Ce projet interroge la notion même de démocratie dans ses modalités d’expression. La représentativité est au centre d’une réflexion que sous-tend cette initiative atypique. Il ne s’agit pas de mettre en cause un des principes clés de la démocratie mais bien de faire apparaitre le décalage voire la discordance entre les récits : récits de ceux qui vivent un quotidien dans la société contemporaine et récits que tiennent (sur eux) ceux-là même qui les représentent.

Avec Raconter la vie c’est un réel dans ce qu’il peut avoir de brut qui est relaté, mis en mots. Ce réel que les normes tendent à escamoter. Et ce projet fait écho aux valeurs. Celles qui fondent une société; le lien social, la rencontre et le partage entre les individus, l’intérêt pour l’autre… Une telle initiative est dans son sens premier subversive, en ceci qu’elle opère un renversement. Il s’agit de permettre l’écoute des individus, de ce qu’ils disent de leur vie, l’écoute des questions auxquelles ceux qui prennent la parole sont aux prises.

Raconter la vie ambitionne ainsi de faire de la parole, de faire de la subjectivité des individus ce qu’il y a d’essentiel parce que constitutif du monde dans lequel nous vivons. Paroles, récits, sens, histoire, subjectivité… n’est-ce pas là d’ailleurs quelques composantes de ce qui fait l’humain ?

Pierre Rosanvallon nous rappelle s’il en était besoin que dès lors qu’une initiative concerne le social elle ne peut pas ne pas être politique. Notion qui bien que complexe et polysémique convoque ce qui est relatif à « la vie de la cité ». Avec les récits de Raconter la vie, ce n’est autre que ce qui fait l’humanité qui cherche à se dire.

Et dire, c’est transformer.

Éditorial de Philippe Bigot
février 2014